Pour mettre fin de manière amiable à des difficultés d’exécution, les collectivités publiques et leurs prestataires ont souvent recours à la conclusion de transactions. Toutefois, pour donner une certaine autorité à ces transactions, les collectivités et leurs prestataires envisagent fréquemment de saisir le juge administratif afin que ce dernier procède à l’homologation de la transaction conclue. Cette homologation judiciaire confère à la transaction un « sceau de légitimité » qui rassure et qui permet aux collectivités de limiter les critiques tendant au versement, sans condamnation, d’une indemnité aux prestataires.
La cour administrative d’Appel de Marseille (tout comme le tribunal administratif en première instance) vient, toutefois, de rappeler que la saisine du juge administratif pour qu’il procède à l’homologation d’une transaction ne peut être qu’exceptionnelle. A défaut, la saisine du juge administratif pour homologation sera, en principe, rejetée pour irrecevabilité. Dans cet arrêt, la cour rappelle que le rôle du juge n’est pas, sauf circonstances particulières, d’homologuer une transaction. Le juge administratif refuse donc d’être une chambre d’enregistrement des transactions négociées par les collectivités avec leurs prestataires pour faire face à des difficultés d’exécution.
En l’espèce, par un contrat de délégation de service public conclu le 21 janvier 2011, la métropole Nice Côte d'Azur a confié à la société VENAP la mise en place et l'exploitation d'un service d'automobiles électriques en auto-partage. Les résultats d'exploitation de ce service ont conduit les deux parties à envisager la résiliation du contrat de délégation de service public. Afin de régler les conséquences financières de cette résiliation, une médiation a été engagée par une ordonnance du président du tribunal administratif du 26 octobre 2018. Toutefois, il résulte de l'instruction et notamment des écritures de la métropole que les parties ont renoncé à cette médiation, tout en poursuivant leurs discussions pour parvenir à la conclusion d'un protocole transactionnel le 13 novembre 2019. C'est dans ce contexte que la métropole Nice Côte d'Azur a demandé au tribunal administratif de Nice d'homologuer cette transaction, la société VENAP s'étant associée à sa demande. La métropole Nice Côte d'Azur relève appel du jugement du 7 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'homologation de cette transaction.
Pour rejeter les demandes des parties, la Cour a, dans un premier temps, rappelé les principes dégagés par le Conseil d’Etat (CE, Ass., Avis du 6 décembre 2002, req. n° 249.153, Syndicat Intercommunal des établissements du second cycle du second degré du District de l’Hay-les-Roses) en rappelant qu’une demande d’homologation d’une transaction ne peut être admise que lorsque « la conclusion d'une transaction vise à remédier à une situation telle que celle créée par une annulation ou la constatation d'une illégalité qui ne peuvent donner lieu à régularisation, ou lorsque son exécution se heurte à des difficultés particulières ».
Or, en l’espèce, la transaction vise à définir les modalités d’indemnisation d’un délégataire à raison de la résiliation d’une délégation de service public. Cette transaction ne vise donc pas à tirer les conséquences d’une annulation ou de l’illégalité d’une délégation de service public.
La demande d’homologation ne peut donc se justifier que par le fait que l’exécution de la transaction se « heurte à des difficultés particulières ». Pour justifier l’existence de telles difficultés particulières, la Métropole et son prestataire invoquait essentiellement deux arguments. D’une part, ils indiquaient que la résiliation anticipée d’une délégation de service public de cette ampleur engendre des enjeux financiers importants qui constituent des « difficultés particulières d’exécution ». La Cour rejette ce premier argument en considérant de manière prosaïque que l’ampleur des enjeux financiers n’est pas de nature, par lui-même, à établir l’existence de telles difficultés. D’autre part, les parties rappelaient à la Cour que la transaction précisait que l’indemnité transactionnelle ne serait versée au prestataire qu’à compter de l’homologation de ladite transaction par le juge administratif. La transaction comportait, donc, de manière classique une clause suspensive que l’on peut résumer de la manière suivante : pas d’indemnité sans homologation de la transaction. La Cour va également rejeter cet argument en considérant que ce dispositif contractuel négociée par les parties (faire dépendre le versement de l’indemnité de l’homologation de la transaction par le juge) ne constitue pas, en tant que tel, une difficulté particulière d’exécution. Ce sont les parties qui sont à l’initiative de cette prétendue difficulté. Elles ne peuvent donc pas utiliser cette prétendue difficulté d’exécution qu’elles ont créée pour justifier une demande d’homologation.
La demande conjointe d’homologation présentée par les parties est donc rejetée par la Cour qui confirme donc la position du tribunal administratif.