L’échange de courriers relatifs à la conclusion d’un protocole transactionnel entre l’acheteur et le titulaire n’interrompt pas le délai de six mois pour former un recours en réclamation devant le juge du contrat
Par cet arrêt du 8 juin 2022, la Cour administrative d’appel de Marseille juge que des négociations entamées avec l’acheteur en vue de la conclusion d’un protocole transactionnel ne valent pas interruption du délai de recours de six mois, prévu par le CCAG-Travaux, laissé au titulaire pour introduire son mémoire en réclamation devant le juge.
En l’espèce, dans le cadre de la réalisation d’un projet d’aménagement, la commune de Marseille a attribué trois lots à prix global et forfaitaire à la société Goppion. Cette dernière a signé avec réserves les décomptes généraux de ces trois marchés de travaux et a adressé des mémoires en réclamation pour chacun des lots. Après une procédure transactionnelle infructueuse, elle a demandé, sans succès, au Tribunal administratif de Marseille de condamner la commune à lui verser la somme de 429 041,80 euros qu'elle estime lui être due en exécution des trois marchés en cause.
Pour confirmer le rejet de sa demande, la Cour administrative d’appel juge que la société a introduit trop tardivement son recours indemnitaire devant le juge du contrat.
En vertu des 3.2. et 3.3. de l’article 50 du CCAG-Travaux dans sa rédaction en vigueur résultant de l'arrêté du 8 septembre 2009 , lorsque le décompte général du marché a donné lieu à réclamation, le titulaire du marché dispose d’un délai de six mois à compter de la notification de la décision prise par l’acheteur pour la contester devant le juge. A l’issue de ce délai, le titulaire est réputé avoir accepté la décision et toute réclamation est irrecevable. Ce délai peut être suspendu par la saisine d’un conciliateur ou d’un tribunal arbitral.
En l’absence d’autres cause d’interruption du délai de six mois fixé par les dispositions précitées, et d’autres cas de suspension que la saisine d’un conciliateur ou d’un tribunal arbitral, le titulaire qui n’a pas introduit son recours dans le délai imposé n’a d’autre choix que de prouver qu’il y a eu saisine d’un conciliateur ou d’un tribunal arbitral.
En l’espèce, la Cour administrative d’appel de Marseille juge que les échanges de courriers entre la société et la commune « en vue de l'élaboration d'un projet de protocole transactionnel qui n'a finalement pas été conclu », n’ont « eu ni pour objet, ni pour effet, de recourir à la procédure de conciliation ou d'arbitrage telle que prévue à l'article 50.5 du CCAG-Travaux ».
Dès lors, en l’absence de recours à un tiers pour régler leur différend, le titulaire ne peut se prévaloir de cette cause de suspension du délai de six mois.
De plus, le juge administratif estime qu’il ne peut déduire de ces échanges que « la commune de Marseille aurait entendu, par ces seules discussions, renoncer à se prévaloir des modalités de contestation et du délai de recours prévus par les stipulations du contrat. »
Ainsi, quand bien même la commune a exprimé la volonté de négocier et de transiger, ces échanges ne peuvent lui être opposés par le titulaire pour démontrer qu’elle a entendu renoncer au délai de recours de six mois.