Le refus par l’acheteur de considérer qu’une prestation constitue une prestation supplémentaire vaut naissance d’un différend
CAA Paris, 16-10-2024, 23PA04029 , Société Air Alizée
La société Air Alizé, après avoir estimé dans un courrier du 15 novembre 2021 que les prestations prévues par le marché ne comprenaient pas les prestations d'urgences ambulancières réalisées sans équipe médicale, et avoir, par un courrier du 17 mars 2022, demandé au CHT une révision des prix des prestations du marché à hauteur de 3 % à partir du mois d'avril 2022, lui a, le 7 juillet 2022, fait parvenir un mémoire de réclamation, qui a fait l'objet d'une décision de rejet le 16 août 2022. La société Air Alizé a alors demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner le CHT à l'indemniser du préjudice qu'elle aurait subi du fait du refus de réviser les prix à hauteur de 3 %, pour un montant de 2 516 828 francs CFP, ainsi que du préjudice qu'elle aurait subi du fait des urgences ambulancières, pour un montant de 26 763 648 francs CFP.
Elle fait appel du jugement du 13 juillet 2023, par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Abordant la question des prestations supplémentaires invoquées par la société Air Alizée, la cour a, tout d’abord, rappelé qu’au sens du CCAG – FCS, « l’apparition d’un différend (…) entre le titulaire du marché et l'acheteur, résulte, en principe, d'une prise de position écrite, explicite et non équivoque émanant de l'acheteur et faisant apparaître le désaccord ». On remarquera, tout d’abord, que la cour applique cette définition du « différend » issu du CCAG – FCS de 2021 à l’ensemble des situations, y compris aux litiges qui découlent de marchés soumis à des CCAG – FCS antérieurs (1977 ou 2009) qui ne définissent explicitement la notion de « différend ».
Nous comprenons qu’en l’espèce, le marché conclu entre la société Air Alizée et le CHT faisait référence au CCAG – FCS de 1977 qui ne définit pas la notion de « différend » et qui se contente d’indiquer en son article 34 que « tout différend entre le titulaire et la personne responsable du marché doit faire l'objet de la part du titulaire d'un mémoire de réclamation qui doit être communiqué à la personne responsable du marché dans le délai de trente jours compté à partir du jour où le différend est apparu ».
Or, et c’’est le grand apport de cet arrêt, le « désaccord » entre l’acheteur et le prestataire peut être uniquement « sémantique » et non encore « indemnitaire », dès los que l’acheteur a pris une « position écrite, explicite et non équivoque » sur son refus de considérer qu’une prestation peut constituer une prestation supplémentaire non prévue au marché.
Par courrier en date du 13 décembre 2021, le CHT a indiqué à la société Air Alizé que ces prestations étaient, au contraire, comprises dans le marché.
Ce qu'il faut retenir