L’approche de la saison estivale ne constitue pas une urgence justifiant une publicité allégée

TA Nantes, 03-01-0023, n°1808058

Par un arrêt du 3 janvier 2023 rendu par le tribunal administratif de Nantes, le juge administratif annule deux arrêtés conférant des titres d’occupation du domaine public sur une plage pour l’exercice d’une activité économique, en l’occurrence de bar restaurant, pour défaut de publicité suffisante. Cet arrêt illustre alors parfaitement la position sévère et protectrice du juge, soucieux de conserver le jeu de la concurrence sur le marché. 

En l’espèce, deux arrêtés ont été pris par le préfet de Vendée le 26 mars 2018. Le premier délivrait une autorisation temporaire d’occupation du domaine public à la société Sea View, suite à une candidature spontanée, sur la plage Boisvinet, pour l’exercice d’une activité de bar-restauration. Cet arrêté a été pris suite à l’absence de renouvellement du contrat de concession conclue entre l’État et la commune de Saint Gilles-Croix-de-Vie le 23 décembre 2005 et s’achevant le 31 décembre 2017. Le second autorisait l’occupation temporaire du domaine public maritime sur la même plage, pour la même activité. La bénéficiaire était la sous-concessionnaire de la concession de plage conclue entre la plage et la commune. 

L’association de protection de la plage de Boisvinet et son environnement demandent l’annulation de ces deux arrêtés. Selon les requérants, ces arrêtés sont illégaux du fait qu’ils violeraient l’article L2122-1-4 du Code général de la propriété des personnes publiques, prévoyant une publicité suffisante lors de la délivrance d’un titre intervenant à la suite d’une manifestation d’intérêt spontanée. Le préfet, lui, s’appuyait sur les articles L2122-1-2 et L2122-1-3 dérogeant à l’exigence de publicité pour les occupations du domaine public de courte durée. 

Le juge administratif réaffirme clairement que les dispositions des articles précités ne permettent pas de déroger à l’exigence de publicité et annule les arrêtés pour vice de procédure du fait que « cette illégalité, qui a privé les tiers susceptibles d'être intéressés d'une garantie et est de nature à avoir exercé une influence sur le sens de la décision, justifie l'annulation de cet arrêté ». 

Le juge administratif adopte ainsi une lecture stricte de l’ordonnance du 19 avril 2017 imposant une mise en concurrence pour l’occupation domaniale lorsque le bénéficiaire exerce une activité économique. Si les occupations de courte durée disposent d’un régime allégé, consistant à une obligation de publicité préalable sans obligation de mise en concurrence, il n’en demeure pas moins que la publicité doit être suffisante, afin de s’assurer « de l'absence de toute autre manifestation d'intérêt concurrente ». 

Le juge administratif apporte également des précisions quant à la caractérisation de l’urgence, en rejetant l’argumentation du préfet tendant à justifier la dérogation à l’exigence de publicité du fait de l’urgence due à la proximité de la saison estivale en 2018, et la nécessité de garantir, pour répondre aux besoins des usagers de la plage de Boisvinet, une activité de bar et petite restauration sur la plage de Boisvinet. Le juge conclut alors que « l'absence de ce renouvellement ne caractérise pas une situation d'urgence. ». 






Ce qu'il faut retenir

1.
Une autorisation du domaine public de courte durée nécessite tout de même une publicité suffisante préalable. 
2.
Le non renouvellement d’une convention de concession, approchant la saison estivale ne constitue pas une urgence. 

À propos de l'auteur

Gautier Guarino

Diplômé du Master 2 Droit Public des Affaires de la faculté Panthéon-Sorbon et de l’Institut de Droit Public des Affaires (IDPA), Gautier est avocat depuis 2019.

Il avait précédemment travaillé au sein du Conseil d’Etat, d’une grande entreprise publique ainsi que dans des cabinets d’avocats français et internationaux.

Gautier conseille et assiste des personnes publiques et privées principalement dans le domaine de la commande publique et du droit public général. Il participe à des formations en droit public.


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